Deadline, la ligne qui ressuscite la BD de western

Publié le par Flora

Deadline raconte la vie d'un homme par fragments, avec comme toile de fond la guerre de sécession.

"la DEADLINE... Rien qu'une ligne pour séparer le monde en deux, la liberté de la barbarie, le bourreau de ses victimes... A moins que ce ne soit l'inverse."

La BD débute par un meurtre, plutôt sanglant, au tout début du XXème siècle dans le Tennessee. Un homme sans identité, d'apparence plutôt normale, tue de sang froid John C. Lester, un des fondateurs du Ku Klux Klan. Une voix off précise juste qu'après le meurtre, "son cœur battait plus fort. Il était arrivé au bout de son parcours. Il le savait".

Flash-back, en 1864, camp d'Andersonville, en Georgie : "ici se trouvait la plus impitoyable des prisons à ciel ouvert du sud". Petit rappel historique (pour ceux qui comme moi ne sont pas des flèches en histoire) : ce camp a été utilisé par les sudistes durant la guerre de sécession pour interner 45 000 nordistes dans des conditions effroyables, ce qui est évoqué ici mais sans s'attarder puisque les auteurs de cette BD, Bollée au scénario et Rossi au dessin,se focalisent plutôt sur le parcours d'un jeune homme, Louis Paugham, qui va se révéler être le personnage central de cette histoire.

Louis est une recrue un peu gauche, qui se retrouve sous les ordres du sergent Lester, "une vraie peau de vache". Lester, accompagné du sergent major Jones, réquisitionne Louis et Blaney, un autre soldat. Leur mission : escorter une quinzaine de prisonniers vers la Caroline du Sud. Parmi eux, un grand noir qui impressionne fortement Louis par son silence et sa dignité. Une nuit d'orage, le grand noir disparaît mystérieusement, sans que cela perturbe Lester et Jones...

Petit à petit, nous découvrons d'autres périodes de la vie de Louis, notamment la mort de ses parents, tués sur la route vers l'Ouest. Il sera recueilli par Philip Paugham, un libre penseur, admirateur de Voltaire et partisan de l'abolitionnisme. Mais Louis se retrouvera bientôt seul, enrôlé de force dans l'armée des confédérés, son père adoptif ayant été assassiné...

Deadline est une BD sanglante, où les meurtres abondent dans une époque il est vrai instable. La trajectoire de Louis est jonchée de cadavres, dans la pure tradition des westerns. Ici, nous ne trouvons pas d'indiens ni de cow-boys, mais plutôt la lutte entre les blancs et les noirs, que Bollée et Rossi mettent en scène à travers cette fameuse deadline, motif récurrent de la BD. Autre originalité de l'histoire et non des moindres : l'homosexualité de Louis qui transparaît à travers son attirance pour le prisonnier noir. Le scénario et les dessins traduisent très bien cette attraction qui va hanter Louis tout au long de sa vie. Evidemment, on pense au film Brokeback Mountain, même si ce n'est pas tout à fait la même époque (et même si Bollée avoue dans une interview ne pas avoir vu le film !) et aussi à Blueberry.

Les dessins de Rossi sont magnifiques de précision, de composition, de finition : du grand art !

En conclusion : ce bel album est une réussite, une petite merveille qui allie une histoire originale avec en toile de fond la grande Histoire (qui donne envie de se documenter sur cette période). Certaines scènes sont un peu violentes à mon goût mais toujours fort bien mises en scène et finalement cette violence n'est jamais gratuite : elle sert le propos. A découvrir !

Deadline, Laurent-Frédéric Bollé, Christian Rossi, Glénat, 92 pages, avec un cahier d'esquisses inclu, 18,50 euros

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