Kafka en Iran : Une métamorphose iranienne

Publié le par Flora

Comme l’indique son titre, Une métamorphose iranienne est un documentaire qui prend la forme d’une BD sur l’Iran, mais le genre déborde les frontières pour en prise directe avec notre monde, plutôt du style coup de poing mais tout en finesse. Ce documentaire est en fait l’autobiographie de Mana Neyestani, l’illustrateur et auteur de cette BD, arrêté en Iran pour avoir dessiné un cafard dans un journal pour enfants. Malheureusement pour lui, son dessin sera mal interprété par les turcs, une minorité ethnique persécutée en Iran qui va manifester sa colère dans la rue. Pour le régime iranien en place, Mana est le parfait bouc émissaire de ces débordements. D’où la référence explicite à Kafka,  présente tout au long de l’histoire sous la forme d’un cafard qui suit Mana comme son ombre.

CouvMetamorphoseHDEn feuillettant le livre rapidement, j’ai d’abord pensé que ce récit allait être compliqué pour moi qui ne connais pas grand chose à l’Iran. Quant aux dessins, ce sont des crayonnés très précis, en noir et blanc, qui me rebutent un peu à vrai dire… Bref, à première vue, cette BD n’a rien pour m’attirer, j’ai même peur de me perdre dans un récit où la politique serait prédominante.

Heureusement, les premières pages balayent ces impressions négatives et le reste achève de me convaincre. Cette métamorphose, celle d’un homme, Mana, est une plongée captivante dans notre monde actuel, avec ses incohérences et ses absurdités. Evidemment, cela se passe en Iran, où les droits de l’homme et du citoyen sont plutôt bafoués, et où il ne fait pas bon être un dessinateur de presse. Mais d’autres pays en prennent pour leur grade (notamment la patrie de Jean-Jacques Rousseau où Mana a finalement trouvé refuge aujourd’hui, après bien des péripéties).  La descente aux enfers de Mana est illustrée par des dessins très réalistes qui traduisent parfaitement les violences subies : l’enfermement,  l’isolement, l’attente dans la prison. Une fois sorti de l’univers carcéral, les obstacles continuent, parfois dus à un tout petit rouage qui curieusement ne se met pas en place à la façon habituelle. La métamorphose iranienne, c’est cela, une somme de petits rouages absurdes, qui se juxtaposent pour former un tout étonnant, qui reflètent la dureté de notre monde, mais où l’humour est présent en dépit de tout. Parce qu’il faut bien rire de certains détails, pour éviter d’en pleurer…

Une métamorphose iranienne, éditions ça et là, 199 pages, 20 euros

 

Publié dans L'attrape-BD

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